ROMAN de la
nuit noire et mystérieuse, Le Moine
de Matthew G. Lewis, écrit en dix mois dans l’optique de divertir la
mère de l’auteur,
est un des romans les plus terrifiants qu’il puisse exister. Le roman
se découpe en deux parties qui finissent par se relier au début : d'un
côté Lorenzo de Las Cisternas et l'intrigue des soeurs du couvent de
Sainte-Claire et de l'autre, l'intrigue du moine au sein du monastère.
En Espagne, au
début du 18ème siècle, époque des couvents, monastères et de l’Inquisition,
période même où la religion exerce un pouvoir puissant sur le peuple, un moine,
respecté de ses frères accueille un nouveau confrère.
C’est
Rosario, un jeune moine novice entouré d’un mystère puissant et pudique à la
fois. Au fur et à mesure, notre moine, dénommé Ambrosio, se lie d’amitié avec
ce nouveau venu et l’apprécie beaucoup malgré son mystérieux passé. Son visage
est toujours caché par le capuchon de son habit, jamais il ne dévoile son
visage.
Mais cette
amitié s’accroît, jusqu’au jour où Ambrosio découvre que Rosario est une femme,
c’est Mathilde. Le pêché dans un monastère ! Une femme a pénétré cet
espace sacré réservé aux hommes. Alors sa passion pour le jeune homme,
maintenant femme, s’amplifie encore et Ambrosio commet alors son premier vice,
son premier méfait. Il s’abandonne à Mathilde.
Mais la
passion du Moine s’amplifie encore, il désire Antonia, une jeune fille dévote
qu’il a plusieurs fois repérée à l’Eglise. Il n’est plus digne d’être un moine,
toute raison n’est plus. Ainsi, Mathilde, devenue son amie après avoir été sa
maîtresse, use de la magie noire pour l’aider et invoquer un esprit malfaisant
qui pourra aider le moine à assouvir ses désirs.
Armé d’un
bâton maléfique qui ouvre les portes et qui permet d’endormir Antonia, le moine
est surpris sur le fait, dans la chambre d’Antonia alors endormie. Elvire, sa
mère, qui se méfiait déjà de ce moine semblablement pervers, s’attaque à lui
mais décède sous le coup de poignard du moine.
Affolé, le
moine, voulant tout de même préserver sa réputation connue de toute la ville de
Madrid, rentre au monastère. Insoupçonné par le respect que le peuple a pour
lui, l’affaire est étouffée.
Dans un
même temps, une autre histoire se déroule, hors du monastère dans la famille
des Las Cisternas, Lorenzo est éperdument amoureux d’Antonia. Mais c’est sur
Agnès, sa sœur, que son concentre l’histoire. Celle-ci est dans un couvent
depuis peu, mais tombe un jour amoureuse de Raymond. Un jour, le moine Ambrosio
ramasse un mot de ce Raymond adressé à Agnès. Ambrosio en fait part à la mère
supérieure, malgré les protestations d’Agnès. Quand le mère supérieure apprend
alors la grossesse d’Agnès en plus ce mot, Agnès disparaît et est passée pour
morte au moment de l’accouchement…
Le roman
finira bien sûr très mal pour le moine Ambrosio qui a poussé Agnès à sa « fausse
mort » puisque celle-ci est en fait emprisonnée dans les caveaux du
couvent. C’est la sœur Sainte-Ursule qui révélera, aux yeux du public, durant
la fête du couvent de Sainte-Claire qui défile dans la rue, l’épouvantable
secret de la mère supérieure et de quatre sœurs complices qui ont enfermé Agnès
et l’on réduite à une prisonnière. Le peuple, soulevé par la honte, se déchaine
sur la mère supérieure et dans d’affreux craquements d’os, roulée, tirée,
écrasée par la populace, la mère supérieure expire quand on lui brise le crane.
Le peuple s’en prend alors au couvent et y met le feu, détruisant tout.
Lorenzo de
Las Cisternas, au service de Raymond, retrouve avec ses archers Agnès, encore
enfermée dans les caveaux et morte de faim. Tandis que, quelques mètres plus
loin, le moine viole impunément Antonia qu’il a réussi à faire croire morte par
le biais d’un narcotique et qui a été enterrée, elle aussi, dans ces caveaux.
Les archers découvrent Antonia, qui s’est vainement débattue, au sol,
poignardée et rattrapent le moine et son acolyte Mathilde, cachés dans un
caveau dont la porte est cachée. Le scandale est à son comble.
Mathilde et
Ambrosio sont donc jugés par l’Inquisition. Mathilde prend la fuite grâce à la
magie juste avant son jugement et exhorte Ambrosio à la suivre grâce à une
formule de sorcellerie. Pusillanime, finalement, après plusieurs tentatives
infructueuses, Ambrosio accepte de vendre son âme au diable sous l’apparence de
Lucifer. Ce n’est qu’après que ce dernier annonce à Ambrosio qu’il n’aurait dû
lui vendre son âme : en effet, le moine allait être gracié par l’Inquisition.
Agnès se
marie avec Raymond et Lorenzo, découvrant morte sa bien-aimée Antonia, épouse
Virginie, une amie de la maison des Lac Cisternas. Le roman se conclue sur une
morale : « Que celui qui n’a jamais pêché, lui jette la première
pierre.
ROMAN
sanglant et comme l’armoirie du vice, Lewis publie en 1796 anonymement puis en
reconnaissant la paternité, en Angleterre alors très conservatrice, un roman
consternant, scandaleux et blasphématoire qui lui vaudra les foudres de sa
famille et les éloges mitigées des critiques. Ce sera la seule œuvre pour
laquelle Lewis passera à la postérité, le succès ne s’étant pas renouvelé après
Le Moine.
Il existe
trois traductions françaises de cet ouvrage, la première de 1796, faite sans
grand respect de l’esprit du roman, celle de Léon de Wailly de 1840, époque où
le roman gothique revient à la mode, certainement la meilleure traduction qui
puisse exister puisqu’elle recrée parfaitement l’harmonie entre le texte et le
fond. Et celle d’Antonin Arthaud, publiée en 1931 chez Gallimard en pleine
période Surréaliste, qui dévoile plus une réorganisation-traduction (une version
spéciale du en somme) qu’une traduction pure et simple puisque Antonin Arthaud
a opéré de nombreuses coupes et a changé l’ordre de certains passages en s’appuyant
sur la traduction de De Wailly.